10 erreurs à éviter” : pédagogie de la peur ou stratégie d’alignement ?
Les “10 erreurs à éviter” pullulent – mais forment-ils vraiment ? Et si le contenu qui rassure empêchait d’agir ? Une critique piquante des formats paresseux… et des alternatives concrètes.
Lucie Michaut
10/19/20254 min read


“Les 10 erreurs à éviter” : le titre se vend souvent mieux que l’idée qu’il contient.
Et pourtant, il prolifère, à la manière d’un lichen sur une écorce éditoriale. On le retrouve partout : dans les colonnes LinkedIn, les tunnels d’on-boarding, les rayons “Business pour les nuls” des librairies d’aéroport.
Il attire, rassure, et promet le contournement sans l’effort du chemin. Mais faut-il vraiment apprendre à éviter, plutôt qu’à tenter ? Faut-il instruire par le soupçon ou par l’élan ? Former des lecteurs à débusquer les pièges ou à poser des gestes justes ?
La question semble anodine. Elle ne l’est point. Car les mots que l’on choisit pour transmettre une idée dessinent, en creux, notre vision du monde. Dire "à éviter" est une injonction qui recule, redoute, se contracte. Elle n’enseigne pas, elle met en garde.
Et c’est bien cela que ce type de contenu produit : une pédagogie défensive, où l’on n’apprend rien d’autre qu’à ne pas mal faire.
Pourquoi ce format séduit-il tant ?
👋 Le biais de négativité pousse ton attention à se fixer sur le risque, l’erreur, l’anomalie.
👋 L’effet de cadrage montre qu’une information négative a plus de poids émotionnel qu’une proposition positive.
Ainsi, entre “Voici ce que vous pouvez faire” et “Voici ce qu’il ne faut surtout pas faire”, la seconde l’emporte, non parce qu’elle est plus utile, mais parce qu’elle résonne plus fort.
Or, à force de dépeindre les gouffres, on installe des balises. Mais où est la (vraie) voie ? On évite, on contourne, on rature mais qu'est-ce qu'on trace ?
Et le lecteur, que lui reste-t-il ? Une liste de fautes, sans plan ? Une peur de mal faire ? Le désir de bien tenter ? Et cette question mal amenée et en suspens : comment ?
On me dira : “mais ce sont les contenus qui fonctionnent le mieux !”
C’est vrai. Mais c'est un contenu qui doit être millimétré comme une course de dominos avec un but final.
Les titres les plus performants sur Amazon ou YouTube obéissent à la même logique : ne pas grossir, ne pas échouer, ne pas perdre d’argent. Le marché aime les formules et les garde-fous qui incitent à ne rien faire.
On le sait depuis la nuit des temps ! Ce qui se vend bien n’est pas toujours ce qui élève. La plupart des gens préfèrent les chips aux carottes. Et vont chiper les (mauvaises) infos pour mieux se faire carotter. Bref.
Il y a des cas où l’évitement est salutaire – comme la conformité, la gestion du risque, la santé. Mais dans les champs créatifs, stratégiques, humains, ce que l’on attend, c'est un plan d’action. Une invitation à penser, faire et créer.
Quelques questions à se poser :
Quelle est la (seule) chose que je veux que mon lecteur tente ?
Quel est le problème douloureux et le besoin urgent de mon lecteur ?
Pourquoi il passerait ensuite à l'action ?
Le but n'est pas de choisir la facilité. Mais l'utilité.
Donne assez sans en dévoiler trop. Pousse l'autre à dire "c'est quoi la suite ?", et surtout "je signe où ?"
La pédagogie par l’évitement : séduisante mais stérile
Les “erreurs à éviter” sont devenues une monnaie éditoriale.
Elles se vendent bien parce qu’elles activent la peur, le doute, le biais de protection.
Mais leur pédagogie est fragile : elle alerte sans guider.
Elle dit ce qu’il ne faut pas faire… sans jamais dire comment faire mieux.
À long terme, elle crée un public prudent, mais pas outillé.
Un lecteur en vigilance constante, mais sans vision claire.
Vous arrive-t-il de construire vos contenus à partir d’une peur implicite ?
Est-ce que cela guide vraiment votre audience… ou la freine par défaut ?
Pourquoi ces formats cartonnent ? Le cerveau aime le négatif
Deux biais cognitifs l’expliquent :
Le biais de négativité : le cerveau retient plus facilement ce qui menace que ce qui promet.
L’effet de cadrage : la même idée, formulée négativement, aura plus d’impact.
C’est simple : “Ne faites surtout pas ça” provoque une tension immédiate.
“Voici ce que vous pourriez faire” demande un effort. Une projection.
Et pourtant, c’est ce second format qui donne la main.
Qui ouvre une voie.
Quand vous choisissez un angle pour vos titres, lequel privilégiez-vous instinctivement ?
Et pourquoi croyez-vous que l’autre fonctionnerait moins ?
Former ou freiner ?
Éduquer par la peur, c’est comme apprendre à nager en listant les noyades.
Oui, on évite un drame. Mais on ne flotte toujours pas.
À force de contenus défensifs, on crée une génération de créateurs obsédés par le “don’t”, incapables de formuler un vrai “do”.
À quoi ressemblerait un contenu qui propose un chemin plutôt que d’agiter les signaux rouges ?
Exercice : Transformer une erreur en invitation
Prenez un de vos posts classiques du type “5 erreurs à éviter”.
Réécrivez-le selon cette structure :
Quel est l’élan initial que votre lecteur cherche à vivre ?
Qu’est-ce qui bloque ou freine ce mouvement (erreur, croyance, peur) ?
Quelle action simple pourrait relancer cet élan avec clarté ?
Résultat : un contenu qui éclaire… sans rétrécir.
Mieux vaut l’élan que l’alerte
Oui, “les erreurs à éviter” font cliquer.
Mais ce qui transforme, ce n’est pas l’évitement. C’est le passage à l’acte.
Les bons contenus ne mettent pas juste en garde.
Ils montrent où aller, pourquoi, et comment.
C’est plus risqué. Moins viral. Plus exigeant.
Mais c’est comme ça qu’on construit une audience qui fait.
Pas une audience qui scroll.
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